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Clara Baglione, créatrice de la startup BeeShary : "Les voyageurs ont beaucoup de choses à s’apporter réciproquement".

Elle promet de bousculer la manière de voyager et de rencontrer les gens. Clara Baglione, 24 ans, a déjà dix ans d’expérience de voyages à travers le monde. Bardée de diplômes internationaux, elle lance un site collaboratif pur, original et ambitieux fondé sur l’échange gratuit d’activités entre voyageurs. Son projet, BeeShary vient de faire un tabac en crowdfunding. 

Clara Baglione à Dacca au Bangladesh où elle a effectué un long stage dans la micro-finance
Pour imaginer un projet comme BeeShary vous avez du baigner dans une culture familiale du voyage ?
A la maison, la culture du voyage passait par les nombreux déplacements professionnels de mes parents, mais sans les enfants ! Cependant, nous avons beaucoup déménagé à travers la France et l’Italie. Mon grand-père qui travaillait à l’international parcourait le monde et me rapportait des cadeaux et des souvenirs qui me faisaient rêver. En réalité, depuis toute petite j’ai la bougeotte et dès que j’ai un peu d’argent, je pars découvrir. 
 
Quels ont été vos premiers grands voyages ?
J’ai fait mon premier grand voyage à 14 ans. J’étais alors déléguée de classe en 4ème et j’ai participé à la préparation d’une grande aventure de trois semaines au Burkina Faso. C’était une sorte de mission humanitaire. Nous voulions nous rendre utiles. Nous avons notamment creusé un puits et planté des végétaux en travaillant avec des collégiens Burkinabé.
C’est de cette expérience qu’est partie ma passion pour les grands voyages. Ce fut un déclic. Dans ma tête c’était clair : « voilà ce que je veux faire, voyager ».  Depuis, j’ai cumulé 26 voyages.  J’ai par exemple passé trois semaines en Australie pour suivre des cours d’anglais, mais j’ai aussi beaucoup voyagé dans des pays d’Europe comme l’Angleterre ou l’Italie où habite maintenant mon père.
 
Avec autant de voyages vous avez pu étudier ?
Après mon bac, j’ai choisi de faire une école de commerce, un cursus de quatre années que j’ai effectué à l’Edhec de Nice avec une spécialisation en finance de marché. Pendant cette période j’ai fait plusieurs stages à l’étranger, par exemple au Luxembourg, au Bangladesh ou encore aux Pays bas. En troisième année, en particulier, je devais faire un stage de longue durée et j’ai choisi la Corée. C’était un échange académique. En cinq mois j’ai visité le territoire de tous les côtés et j’ai été passionnée par la culture de ce pays qui avait souffert de l’asservissement japonais et qui vivait avec une présence de troupes militaires américaines.
L’intérêt de ce type de voyage d’étude est que j’aie pu travailler sur place. Je n’y allais pas en vacances et, en même temps, j’étais obligée de prendre mon temps, de me mettre au rythme du pays et de vivre à la manière des habitants, de me fondre dans la masse. 
 
 
Clara Baglione, à la fois globe-trotteuse et créatrice de la start-up Beeshary
Y a-t-il un voyage qui vous ait particulièrement marquée ?
Dans le prolongement de mon diplôme, je suis partie pendant six mois travailler dans une startup de microfinance au Bangladesh, un des pays les plus pauvres de la planète. Cette entreprise était installée dans le fin fond d’un bidonville de Dacca la capitale.
C’était un quartier sans eau potable et avec des coupures d’électricité très fréquentes. Mon immersion complète dans cette société a remis en question beaucoup de mes certitudes. Dans ce pays où la misère crève les yeux, où les hiérarchies sont pesantes et la corruption avérée, l’étranger est un ovni. Les mois que j’y ai passés ont d’abord été révélateurs pour moi-même, m’ont remise en question et m’ont poussée à l’ouverture.
 
Qu’est-ce qui vous a le plus touchée dans ce contexte ?
Ce qui m’a le plus touchée, ce sont les relations humaines fortes que j’ai eu la chance de tisser à cette occasion. Par exemple avec une stagiaire espagnole qui travaillait à mes côtés, Gabriella. Mais surtout avec Dejenara, une femme qui assurait toutes les tâches ménagères de notre logement et subissait le machisme ambiant. 
Dejenara ne parlait pas anglais, pourtant petit à petit nous avons réussi à communiquer. Elle m’a beaucoup appris, par exemple sur la cuisine locale et le rôle de la femme dans la société Bengali et elle m'a surtout permis de faire une grande introspection sur moi-même.
 
Que vous a-t-elle révélé ?
C’est là que j’ai eu la grosse révélation de ma vie : j’ai eu la conviction de devoir mettre tout en œuvre pour fédérer une communauté favorisant les échanges entre voyageurs. Mon idée initiale était de mettre en relation des voyageurs de pays développés et de pays en développement.  Mais cette idée était difficilement réalisable car trop globale pour débuter. J'ai du alors peaufiner mon projet.
 
Comment a-t-il pu mûrir ? 
J’ai voulu compléter ma formation, trop éloignée de mon cursus initial de finance de marché. J’ai choisi de préparer un master entrepreneurial dans le cadre du Global Entrepreneurship program à Lyon. Cette formation en anglais obligeait à passer 4 mois en France, 4 mois en Chine et 4 mois aux Etats-Unis. J’ai donc fait un joli tour du monde en bénéficiant d’un programme très enrichissant. Surtout cette expérience a été partagée avec des étudiants de 25 nationalités différentes. A mon retour, Houda une amie de l’Edhec, ma première école de commerce, m’a rejoint dans l’aventure BeeShary apportant avec elle ses compétences en communication, son écoute et ses bonnes idées.
 
Au détour d'un de ses innombrables voyages dans un temple Angkor au Cambodge
Qu’avez-vous retenu de tous vos voyages ?
Mes voyages les plus réussis ont été ceux où j’ai fait les plus belles rencontres humaines, où j’ai eu de belles discussions, où j’ai participé à la vie locale, souvent en logeant chez l’habitant. Je me souviens par exemple de voyages au Népal, au Cambodge ou au Viêt-Nam. Je crois beaucoup à l’humain. J’aime beaucoup les paysages, mais encore plus les personnes.  Les voyageurs ont beaucoup de choses à s’apporter réciproquement.
 
Ce sont ces idées qui nourrissent votre projet ?
En effet. Mon projet Beeshary propose une autre manière de voyager, à partir du partage humain, avec les yeux des habitants, en s’immergeant avec eux dans les villes et les villages visités. Beeshary est  une personnalisation du voyage par la rencontre, une manière de découvrir ce qu’on ne trouve pas dans les guides, à travers les individus et par l’échange. N’importe quelle idée peut être apportée, que ce soit un pique-nique dans un lieu original ou de belles histoires à raconter quelque part, du moment que ce soit spontané, authentique et dans la bonne humeur.
 
Est-ce un site français ou francophone ?
Nous démarrons prudemment en France seulement, à partir de la région Paca, mais nous allons nous étendre assez vite et nous avons vocation à devenir internationaux en étant publiés en anglais.
 
Vous vous situez dans la lignée des grands sites collaboratifs du type Airbnb ?
Non, nous ne nous sommes pas du tout inspirés du modèle Air BnB qui fonctionne sur un système de rémunération.  A l’inverse chez nous, il n’y a rien à payer, seulement à échanger, sans manipulation d’argent. Beaucoup d’initiatives de ce genre émergent sur le net, mais la plupart du temps ce sont des services contre rémunération, ce qui gâche tout. Même dans le système du couchsurfing, par exemple, il n’y a pas forcément de réciprocité. Chez Beeshary, il y a forcément réciprocité, on ne peut pas se contenter de n’être qu’utilisateur. 
 
Pour échanger il faut bien une sorte de monnaie virtuelle si l’on veut que le troc soit équitable ?
L’échange se fera sur la base de points que nous appelons « honey drops »  (gouttes de miel). Leur montant sera calculé automatiquement par un logiciel que nous mettons au point. Il tiendra compte de plusieurs variables telles que la catégorie dans laquelle s'inscrit l'expérience, sa durée, son originalité. A terme, notre objectif sera de créer une vraie communauté de voyageurs fonctionnant réciproquement sur le principe de l’échange gratuit.
 
Si tout est gratuit, quel sera votre modèle économique ?
Pour le voyageur, tout est gratuit mais nos frais de fonctionnement seront amortis par des annonceurs, des partenariats stratégiques avec des renvois sur d’autres sites et des comptes premium ouvrants sur des prestations payantes du type assurances.
 
Est-ce que le lancement de votre startup vous laisse encore le temps de voyager ?
Même si je dois ralentir, je compte bien continuer de voyager. Je suis très curieuse et ouverte à toutes les opportunités et à tous les pays. Je rêve toutefois en particulier d’aller en Mongolie, en Inde, en Amérique du Sud, en Afrique… et puis j’aimerais refaire un vrai tour de France pour commencer à balayer devant ma porte car la France est belle !