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L'orphelinat de Bingerville (Côte d'Ivoire)

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L'orphelinat de Bingerville (Côte d'Ivoire)

Une page d’histoire. Si vous êtes curieux, vous auriez fait comme moi, vous n’auriez pas résisté à la tentation d’entrer voir cet endroit étonnant, que j’avais aperçu en passant lors de ma dernière visite en Côte d’Ivoire en 2013! Face à une grande pelouse d’un vert  impeccable, encadrée de palmiers aux troncs peints en blanc, je ne m’attendais pas à trouver un palais d’aussi fière allure, sorti tout droit d’une planche de dessin d’architecte du XIXème siècle ou d’un auteur de bande dessinée. Les cris joyeux et les jeux de jeunes garçons résonnaient autour de ce monument néo-palladien à colonnes et à terrasses ouvertes, bordées de balustrades. J’ai été impressionné par ce majestueux édifice couronné par un fronton triangulaire, et par son escalier extérieur à double volée, aux lignes toutes en courbe, digne d’une  entrée de théâtre ou d’opéra. J’ai aimé ce palais qui me semblait surgi de nulle part.

J’ai donc cherché à comprendre quelle était l’origine de ce bâtiment et j’ai dû explorer et fouiller des documents d’histoire. Il fut construit entre 1905 et 1912. Aujourd’hui classé monument historique ivoirien, il  a été pendant plusieurs décennies, le palais des gouverneurs de la Côte d’Ivoire. A l’origine, Bingerville, situé à 18 kms à l’est d’Abidjan, s’appelait Alhobe. C’était un modeste village de pêcheurs de l’ethnie ébrié, au bord de la lagune du même nom. Mais l’administration coloniale française choisit d’en faire la capitale de la Côte d’Ivoire, ce qu’elle fut entre 1900 et 1934, après Grand Bassam, la première capitale, et avant Abidjan la troisième capitale.

Bingerville vient du nom d’un gouverneur de la colonie, Louis-Gustave Binger. Ce militaire de l’infanterie de marine avait été officier d’ordonnance du général Louis Faidherbe alors gouverneur du Sénégal et qui avait jeté les bases de la future Afrique occidentale française. Dans ce cadre, Binger avait été envoyé pour délimiter les frontières de la nouvelle colonie de Côte d’Ivoire qui fut créée de toutes pièces en 1893 à partir des Comptoirs français du Golfe de Guinée. Binger quitta la nouvelle colonie dès1895 mais 5 ou 6 gouverneurs se succédèrent plus tard au Palais de Bingerville jusqu’au transfert des administrations coloniales à Abidjan.

Le palais des gouverneurs de Bingerville connut ensuite plusieurs utilisations. Notamment celle de « foyer des métis », une périphrase hypocrite pour cacher la mauvaise conscience des autorités coloniales face à la réalité des « métis coloniaux », des enfants non reconnus et abandonnés par des pères militaires indignes. En 1953, il devint l’orphelinat national mixte de garçons et de filles, puis, en 1972, orphelinat de garçons, suite à la création d’un orphelinat de filles à Grand Bassam.

Aujourd’hui cette vénérable institution ivoirienne accueille environ 200 enfants, principalement de niveau primaire. J’ai fait le tour du monument et vu plusieurs bâtiments qui lui ont été ajoutés et une aire de jeux financée par la Fondation Children of Africa. Mais visiblement l’infrastructure du bâtiment central, sans doute faute de moyens, paraît lépreuse. Des parties sont rongées par l’humidité et des plantes vivaces envahissent dangereusement les balcons et les balustres.

Pourquoi ne pas repenser son usage ? Par exemple en lançant un appel à financements et à une souscription publique pour reconstruire un orphelinat aux normes actuelles, adapté aux réels besoins des enfants et de leurs éducateurs. Et de l’autre rénover ce bâtiment pour en faire un musée national d’histoire qui témoigne de l’histoire du pays et de ses souffrances. J’ai vu beaucoup de pays ex colonisés qui ont su utiliser en ce sens un patrimoine colonial au premier abord douloureux. Par exemple Gorée au Sénégal ou l’Aapravasi Ghat, lieu de débarquement des travailleurs indiens au XIXème siècle, à l’île Maurice, tous deux maintenant au patrimoine mondial de l’Unesco. Autre suggestion, en faisant appel au mécénat des entreprises de la filière cacao, pourquoi ne pas y installer un musée du chocolat d’envergure internationale, puisque le cacao est la richesse et la fierté de la Côte d’Ivoire ? De tels projets, comme cela se vérifie dans de nombreux pays, seraient susceptibles d’attirer de nombreux touristes, de contribuer au développement économique de Bingerville et, pourquoi pas, d’aider au fonctionnement d’un orphelinat plus moderne !

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