Un voyageur au XVIIème siècle. J'avais fait de nombreux voyages dans cette région parfois encore appelée "Levant" (Liban, Syrie, Jordanie, Israël, Palestine) et c'est naturellement que j'ai été attiré par cet auteur, journaliste à ses débuts comme moi. L’œuvre de ce franco-libanais (Goncourt en 1993) est imprégnée de nomadisme. Périple est synonyme de voyage. Celui de son roman se situe au XVIIème siècle, qui était l'âge d’or de l’empire Ottoman. Maalouf a imaginé un personnage, Baldassare, né à Gibelet (actuelle Byblos au Liban), descendant de seigneurs génois, érudit et brocanteur. Il est baigné dans les mondes musulman, juif et chrétien, et déstabilisé par des prédictions de fin du monde annoncée pour1666 tout en étant titillé par la recherche d’un magique « Centième Nom » (Le Coran s’arrêtant au 99ème nom d’Allah).
Ses interrogations, ses peurs, sa curiosité le poussent dans un voyage en zigzag dont à peu près toute la maîtrise lui échappe : l’Anatolie, Istanbul, Smyrne (actuelle Izmir), l’île de Chio, Gênes, Minorque, Tanger, Lisbonne, Amsterdam, Londres, Calais puis à nouveau Gênes (avec de trop rares et brèves descriptions comme Gênes ou Tanger par exemple). J’ai cru retrouver en lui l’impréparation de mes premiers voyages. Un mot qui échappe à Baldassare ou un quiproquo suffisent à changer son itinéraire. Il traverse, terres et mers et un monde de brigands et de pirates, de fonctionnaires vénaux. Il est travaillé par les superstitions et les prévarications et bousculé par les guerres mais aussi parfois ému par la générosité, la foi et l’amour. Sa course au-devant de la fin des temps le ballotte de ville en ville. Toujours, il est travaillé par les interrogations, les signes, les secrets, le scepticisme et l’indécision. L’écriture classique, parfois drôle de Maalouf, nous fait entrer dans le mental de ce carnet de voyage. Au fond, le monde troublé qu’il traverse est-il si éloigné de notre monde actuel ?
Editions Grasset, 2000