Un chef d’œuvre mondial de l’art roman. Cette sculpture date du début du XIIème siècle. Un artiste inconnu l’a sculptée il y a près de 900 ans. Pour la voir, j’ai fait un détour, comme beaucoup de voyageurs qui viennent du monde entier en Bourgogne. Elle est une des merveilles de l’abbaye de Vézelay qui avait été classée au patrimoine mondial de l’Unesco dès 1979 (les premiers sites du patrimoine mondial n’ont été inscrits qu’en 1978). Ce tympan sculpté a bien résisté au temps car il est protégé à l’abri dans le narthex, une sorte de vestibule avant l’entrée dans la nef principale de l’église.
Bien qu’il s’agisse d’un relief en saillie de la paroi du tympan, très en hauteur au-dessus du portail, et éclairé par des projecteurs latéraux produisant des ombres, j’ai tout de suite été impressionné par l’extraordinaire impression de mouvement qui s’en dégage. Une sculpture est souvent figée. Je n’ai retrouvé une telle dynamique que dans certaines sculptures du Bernin au musée Borghèse à Rome… datant du XVIIème siècle. Ici dans cette abbatiale du moyen-âge, le Christ dans sa mandorle (la forme d’amande ou d’ellipse dans laquelle il est posé) semble évoluer entre ciel et terre. Il est comme dans une toile du peintre belge Magritte (du XXème siècle) qui m’a toujours fasciné, le château des Pyrénées : on ne sait pas s’il monte, s’il descend ou s’il est en lévitation.
L’impression de mouvement dans cet espace aussi contraint au-dessus du linteau est aussi créée par les impulsions optiques des nombreux plis croisés et superposés de la tunique du "Christ en majesté", ondulant en spirales, notamment au niveau de son genou gauche et de sa hanche droite. Comme mus par un souffle. Une forme d’art surréaliste ou cinétique avant l’heure. L’objectif de l’artiste est de toute évidence de souligner la vie que représente Jésus ressuscité avec ses bras ouverts rappelant la croix sur laquelle il a été cloué et évoquant l’accueil miséricordieux, deux thèmes chers au christianisme.
J’ai choisi de publier cette sculpture dite du "Christ en gloire" en ce jour de Pâques, car c’est la fête la plus importante qui donne tout son sens à la foi des chrétiens. Mais j’aurais pu la mettre en ligne 50 jours plus tard lors de la fête de la Pentecôte qui commémore le jour où l’Esprit Saint est "tombé" sur les apôtres. Car si vous regardez bien, c’est ce que représente cette sculpture : des mains (exagérément grandes) du Christ partent des rayons qui atteignent les apôtres. Et tout autour de cette photo que j’ai utilisée, une foule de personnages, comme une bande dessinée qu'on ne voit que très partiellement ici, peuple les voussures, les chapiteaux, le linteau, le trumeau, le piédroit, les portails latéraux, les frises et tous les éléments architecturaux de cette incroyable basilique. Certains de ces personnages déformés et stylisés m'ont fait penser à ceux de peintres flamands du XVIème siècle comme Jérôme Bosch ou Peter Brueghel. Il vous reste à les découvrir complètement par vous-même.